édition 48

La nouvelle normalité est porteuse d’opportunités dans le secteur des assurances

Une initiative d’EY en collaboration avec ECHO CONNECT ET TIJD CONNECT

Si l’assureur ne change pas la société, il doit s’adapter suffisamment vite pour continuer d’y jouer le rôle qui est le sien. La crise sanitaire l’a de nouveau démontré de manière particulièrement pertinente. Toute évolution de notre comportement implique une évolution des risques auxquels nous nous exposons. Les assureurs doivent y réagir de façon flexible et adéquate.

De manière générale, la rentabilité du secteur a bien résisté, même si l’on note des écarts majeurs entre les acteurs de ce marché très diversifié. Simultanément, les évolutions existantes se sont accélérées, estiment les experts EY Kris Volkaerts et Katrien De Cauwer.

Kris Volkaerts est Financial Services Insurance Leader chez EY Belgium et a travaillé toute sa carrière chez et pour des assureurs.
Katrien De Cauwer est Financial Services Actuarial & CFO Consulting Leader. Elle s’occupe surtout du volet financier et risque des assurances.

Kris Volkaerts

Kris Volkaerts

Financial Services Insurance Leader EY

Katrien De Cauwer

Katrien De Cauwer

Financial Services Actuarial & CFO Consulting Leader

La demande évolue, l’offre suit

“Les taux bas, la complexité croissante de la réglementation et bien entendu la numérisation ont bouleversé le marché des assurances ces dernières années”, note Kris Volkaerts. “Les attentes du client ont elles aussi évolué”, embraie Katrien De Cauwer. “Dans le contexte de forte volatilité que nous connaissons aujourd’hui, il est indispensable de faire preuve de réactivité et de flexibilité. Il convient d’ajuster son offre pour répondre aux demandes du client, ce qui exige un cadre de réflexion totalement neuf.”

La crise sanitaire a certes accentué cette tendance, mais il subsiste de grandes différences entre assureurs ainsi qu’avec les autres acteurs du secteur – les courtiers et autres agents, surtout. Si de nombreux intermédiaires ont connu une période difficile, certains ont engrangé les meilleurs résultats de leur histoire, par exemple parce qu’ils avaient déjà beaucoup investi dans la numérisation.

Court et long termes

Pendant le confinement, la circulation automobile a presque totalement disparu, ce qui a réduit le nombre d’accidents et donc de sinistres. “C’est une conséquence à court terme de la crise sanitaire, mais elle a son importance pour les assureurs, car les assurances auto représentent plus de 30% du chiffre d’affaires dans la branche non-vie”, indique Kris Volkaerts. “Voici 10 ans, il n’existait que des assurances automobiles et l’occasionnelle assurance vélo. Désormais, le télétravail est la norme, et les campagnes de sensibilisation qui encouragent le retour en ville et l’utilisation accrue des transports en commun commencent à produire leurs effets. L’assureur doit pouvoir y réagir. À long terme, il n’existe qu’une seule certitude: dans une décennie, le marché aura changé du tout au tout.”

Le pire de la crise sanitaire reste-t-il à venir?

L’impact financier de la crise sanitaire sur le secteur des assurances est complexe et très variable. “Il faut faire preuve d’énormément de nuance”, insiste Katrien De Cauwer.

Revenus de primes

À court terme, ils pourraient chuter dans certaines branches, comme les assurances crédits et les accidents de travail. Et bien que la quantité totale d’épargne se soit accrue en Belgique, les revenus de primes des assurances-vie individuelles ont diminué. Sans doute parce que, par rapport à leur pendant bancaire, ce sont des produits plutôt complexes qu’encore peu d’assureurs proposent sous forme numérique.

Sinistres

La plupart des assureurs dans la branche non-vie ont enregistré un net repli de leurs activités – pensez aux accidents de voiture et aux cambriolages. Pour les assurances hospitalisation, il est difficile d’estimer l’impact à long terme des reports de consultations, entre autres.

Revenus de placements et d’investissements

Les cours des actions et des obligations ont connu de puissantes fluctuations à court terme. Ceci dit, les assureurs investissent principalement à long terme. L’impact réel sur le rendement financier dépendra du redressement des Bourses et du retour d’une certaine stabilité sur les marchés. C’est surtout l’impact de la crise sur l’immobilier qui suscite de grandes incertitudes. De nombreux assureurs disposent en effet d’un épais portefeuille immobilier. Or, il n’est pas impossible que la crise pèse sur la demande de bureaux et d’immobilier commercial, ce qui pourrait avoir un impact sur le rendement.

Les départements Planification et Contrôle doivent relever d’importants défis, évaluer aussi précisément que possible la situation spécifique de l’assureur et élaborer des mesures pour protéger leur position financière. À cet égard, chaque acteur constitue un cas à part. Pourtant, Katrien De Cauwer ne considère pas le tableau dans son ensemble comme problématique. “Avant la fin de l’année 2019, la Banque Nationale avait publié un ratio de stabilité moyen de 187%, ce qui est largement suffisant. À la mi-mai, celui-ci était retombé à 165%, ce qui reste assez confortable. À court terme, la crise n’a donc eu qu’un impact limité sur la solvabilité du secteur belge des assurances, notamment grâce au mécanisme d’ajustement de volatilité. La vision de long terme des investissements des assureurs est dès lors prise en compte dans le calcul de leurs exigences de solvabilité. Certains acteurs de niche ont toutefois vu leur solvabilité se dégrader. Quant au long terme, chaque assureur a ici aussi la tâche complexe d’évaluer l’influence qu’aura la crise sanitaire sur sa solvabilité, ainsi que les mesures qu’il doit prendre pour la préserver. Une nouvelle fois, chacun d’entre eux se trouve dans une situation particulière.”

Une nouvelle situation porteuse d’opportunités inédites

“Auparavant, l’activité vie était surtout focalisée sur l’épargne”, rappelle Kris Volkaerts. “Or, face à la faiblesse des taux d’intérêt, c’était intenable pour les assureurs et moins intéressant pour les preneurs d’assurance. Ces dernières années, nous observons une évolution claire vers la protection, pour tout ce qui touche au revenu garanti ou à l’invalidité, entre autres.” La pandémie a replacé ces risques sur le devant de la scène.

“La crise sanitaire a accru la pertinence de certaines assurances. Les exemples les plus évidents sont l’assurance vélo et l’assurance cyberattaques. Une ‘pandémie numérique’ qui paralyserait le Web n’est certainement pas à exclure. Certes, ce n’est pas aux assureurs d’éviter un tel scénario, mais ils ont leur rôle à jouer dans la prévention et la protection.”

“Si les assureurs investissent depuis toujours dans la prévention, ce sera encore plus vrai à l’avenir. Ils contribuent à réduire les risques, par exemple en matière de cybersécurité, mais aussi avec la prévention au sein des entreprises, la télématique et les trackers de santé. Et quant à l’internet des objets, il s’agira toujours d’un exercice d’équilibriste sur la corde raide des règles de protection de la vie privée.”

La crise sanitaire, catalyseur numérique

La pandémie a accéléré la numérisation. “Voici un bon exemple: la gestion des documents”, illustre Kris Volkaerts. “Lorsqu’on travaille à distance, il faut pouvoir se passer de papier. La crise sanitaire a donné un coup de fouet à la numérisation des documents entrants et sortants. L’évolution s’est transformée en révolution.”

“Pour la première fois, les compagnies d’assurances ont été touchées dans leurs opérations. Jusqu’à présent, elles avaient toujours pu prévoir la capacité nécessaire, y compris dans les pics, saisonniers ou non. Cette prévisibilité a disparu ces derniers mois, notamment avec un recul de la demande d’assurances-vie individuelles et des sinistres à traiter. Les assureurs ont dû faire preuve de créativité avec leur personnel.”

“Dans ce domaine, ils peuvent prendre les hôpitaux en exemple. Ceux-ci sont parvenus à étendre des départements entiers, à former du personnel, à exiger davantage de flexibilité et à investir dans la gestion des connaissances. La numérisation jusqu’au client final est un défi pour les assureurs, mais la nécessité de gagner en agilité au niveau des organisations l’est tout autant. Leur succès futur dépendra de leur vitesse de réaction.

Élargissement du rôle social des assureurs

La mission fondamentale des assureurs est de limiter des risques. “Et ce rôle social se retrouve sous le feu des projecteurs, singulièrement depuis la crise sanitaire”, constate Katrien De Cauwer. “Cette tendance préexistante doit être considérée dans le cadre plus large des objectifs de développement durable des Nations unies, de l’accord de Paris sur le climat, etc. Ici aussi, le secteur s’adapte et l’on s’attend à ce que sa contribution à une société durable constitue un facteur de succès pour l’avenir. Je pense à une politique d’investissement durable ou à une offre de produits durables, à la réduction de l’empreinte écologique, à des investissements dans une politique de personnel durable qui repose sur la nouvelle réalité du (télé)travail, comme dans une politique de formation attentive à la problématique de la fin de carrière.”

“En outre, l’intérêt pour le reporting non financier s’accroît. Quelles actions et activités les entreprises mettent-elles en place pour favoriser la durabilité? Cette question est de plus en plus posée par le régulateur. Ceci dit, le consommateur, le travailleur et le candidat à l’embauche la posaient depuis longtemps déjà, et ils ont fait bouger les choses. Pensez aux efforts entrepris en matière d’égalité des genres: 40 institutions financières, dont de nombreux assureurs, ont signé la charte de Women in Finance Belgium, organisation qui défend la diversité des genres dans le secteur financier belge.”

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Kris Volkaerts

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Katrien De Cauwer

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